CHAPITRE VINGT-CINQ

A mon réveil, Stark était parti. Reposée et affamée, je m’étirai en bâillant.

Sur le drap, à côté de moi, j’aperçus une flèche cassée en deux. Comme je viens de Broken Arrow, le symbole ne m’échappa pas : la trêve ; la fin des combats. Il y avait aussi un petit mot plié en deux, avec mon nom dessus. Je l’ouvris.

« Je te regarde dormir. Tu sembles totalement sereine… Qu’est-ce que je t’envie ! Moi-même, je suis en proie à une tourmente intérieure. Je désire ce que, je pense, je n’obtiendrai jamais. Stark. »

— Tu as vu ça ? demandai-je à Nala.

Elle éternua, ronchonna, puis se dirigea à pas feutrés vers sa gamelle. Elle me regarda en miaulant.

— Oui, oui, je sais. Moi aussi, j’ai faim.

Je la nourris avant de m’habiller en pensant que cette nuit serait décisive.

— Aujourd’hui, on fiche le camp, annonçai-je à mon reflet après avoir à moitié discipliné mes cheveux à coups de fer à lisser.

Dans la cuisine, j’attrapai un paquet de mes céréales favorites et je rejoignis les Jumelles à leur table. Penchées l’une vers l’autre, elles chuchotaient, l’air contrarié.

— Salut, les filles, dis-je en m’asseyant. Que se passe-t-il ?

— Tu vas vite t’en rendre compte par toi-même, répondit Erin tout bas.

— Ouais, regarde les autres, murmura Shaunee.

Je balayai la pièce des yeux avec une parfaite nonchalance – du moins, je l’espérais.

Au début, je ne remarquai rien. Les filles mangeaient, assises à leurs places habituelles. Et soudain je compris que ce qui clochait n’était pas ce que je voyais, mais ce que je ne voyais pas – ou plutôt ce que je n entendais pas. Aucune blague ne fusait ; personne ne se moquait des cheveux de sa voisine et ne se faisait envoyer promener ; personne ne parlait de garçons ; personne ne se plaignait de ne pas avoir fait ses devoirs. Elles se taisaient, se contentant de mâcher, de respirer et de sourire.

— C’est quoi, ce cirque ? demandai-je aux Jumelles.

« Les envahisseurs sont parmi nous », articula Erin

en silence.

— Presque aussi casse-pieds que ce salaud de Stark, marmonna Shaunee.

— Stark ? Qu’est-ce qu’il a fait encore ? lançai-je de ma voix la plus innocente.

— Eh bien, il est passé tout à l’heure, tranquille, comme s’il était chez lui et qu’il se fichait bien d’avoir quasiment violé une pauvre novice sans défense.

— Ouais, tu aurais dû voir Becca ! enchérit Erin. Elle bavait sur lui comme un bouledogue.

— Et qu’est-ce qu’il a fait ?

— Il l’a ignorée ! dit Shaunee. C’était pathétique.

— Jetée comme un vieux mouchoir.

Je cherchais un moyen d’en savoir plus et, éventuellement, de le défendre sans trahir mon intérêt pour lui quand les yeux d’Erin, qui regardait derrière moi, sortirent de leurs orbites.

— Quand on parle du loup… siffla Shaunee d’une voix fielleuse. Tu te trompes de table, tes esclaves sont par là-bas.

Elle désigna les autres filles, qui avaient arrêté de manger et nous dévisageaient, bouche bée.

Je me tournai vers Stark et nos regards se croisèrent.

— Salut, Stark, dis-je d une voix neutre, ni trop aimable ni trop glaciale.

— -Tu as l’air en meilleure forme qu’à notre dernière rencontre.

Je me sentis rougir.

— Pas étonnant ! intervint Erin. La dernière fois que tu l’as vue, tu étais en train d’agresser Becca.

— Oui, il y avait de quoi avoir l’estomac retourné, commenta Shaunee.

Il leur jeta un regard mauvais, les yeux écarlates.

— C’est à Zœy que je parle, pas à vous. Alors, fichez-moi la paix !

Sa voix avait quelque chose de profondément effrayant. Il n’avait pas hurlé, son expression avait à peine changé ; pourtant, elle évoquait un serpent à la morsure mortelle sur le point de frapper. L’examinant de plus près, je distinguai une ondulation dans l’air qui l’entourait, telles des vagues de chaleur s’élevant d’un toit brûlant. À en juger par la pâleur des Jumelles, elles avaient senti quelque chose, elles aussi.

Je leur accordai juste un regard, me focalisant sur Stark, car le monstre dont il avait parlé était là. Il me faisait penser à Lucie avant qu’elle ne retrouve son humanité.

Etait-ce la raison pour laquelle il comptait tant pour moi ? Lucie s’était débattue contre les mêmes pulsions maléfiques, et les avait vaincues : voulais-je croire qu’il pourrait en faire autant ?

En tout cas, mon expérience m’avait appris une chose : un novice dans cette position pouvait être très dangereux.

— Que voulais-tu me dire, Stark ?

Je voyais sur son visage qu’il luttait pour ne pas sauter par-dessus la table et dévorer les Jumelles.

— Rien de spécial. Je viens de trouver ça ; c’est à toi, non ?

Il brandit mon sac.

— Oui, merci beaucoup !

Je lui souris et tendis la main.

— Un jour, un garçon m’a raconté que les sacs de filles lui faisaient penser à des araignées, dis-je lorsque nos mains s’effleurèrent.

Le rouge quitta ses yeux comme si j’avais appuyé sur un interrupteur. Le voile sombre qui l’entourait disparut. Dans un geste aussi discret que rapide, il captura un de mes doigts entre les siens.

— Des araignées ? Tu es sûre que tu as bien entendu ?

— Certaine. Merci encore !

Il haussa les épaules, pivota sur ses talons et sortit, le dos voûté.

Dès qu’il fut parti, tout le monde, hormis les Jumelles et moi, se mit à commenter sa beauté avec excitation. Je retournai à mes céréales sans rien dire.

— Il me donne la chair de poule, lâcha Shaunee.

— Lucie était comme ça avant de se transformer ? demanda Erin.

— Oui, plus ou moins… Vous n’avez pas remarqué un truc bizarre autour de lui ? Une sorte d’ondulation, une ombre très foncée ?

— Non, j’étais trop occupée à me répéter qu’il allait me mordre, répondit Erin.

— Moi aussi, fit Shaunee. Et toi ? C’est pour ça que tu n’as pas eu peur ? Parce qu’il te fait penser à Lucie ?

Je fis oui de la tête, contente que ma bouche pleine me dispense de répondre.

— Sérieusement, reprit Erin, je sais bien ce que dit le poème de Kramisha, mais il faut que tu sois très prudente en sa présence. C’est un sale type.

— Et puis, le poème ne parlait peut-être pas de lui, enchaîna Shaunee.

— Hé, on est vraiment obligées de parler de ça maintenant ?

— Non, répondit Shaunee. Pour nous, il n’a aucune importance.

— Exact, confirma Erin. Tu ne vas pas vérifier qu’il ne t’a rien volé ?

— Si, si…

J’ouvris mon sac et le fouillai sans conviction en faisant l’inventaire à voix haute.

— Téléphone portable… gloss… lunettes de soleil… portefeuille avec… oui, tout mon argent et ma carte de crédit et…

Je m’interrompis brusquement. Je venais de trouver un petit message. Sous le dessin d’une flèche cassée en deux, Stark avait écrit : « Merci pour hier soir. »

— Quoi ? demanda Erin, qui regardait par-dessus la table. Il t’a piqué un truc ?

— Non, répondis-je en refermant le sac. Ce n’est qu’un vieux Kleenex dégoûtant. Pour le coup, j’aurais bien aimé qu’il me le pique.

— N’empêche que c’est toujours un pauvre mec, grommela-t-elle.

J’acquiesçai en essayant de ne pas penser à la main tiède de Stark dans mes cheveux.

Mes cours, comme l’aurait dit ma prof d’espagnol, Mme Garmy, si elle ne s’était pas rangée du côté des envahisseurs, ne furent pas buenos para mi. Pourtant, sans les Corbeaux Moqueurs, qui semblaient pousser comme des champignons, j’aurais presque pu me convaincre que tout était normal. Mais « presque » a parfois beaucoup d’importance…

Comme mon emploi du temps avait été modifié, je n’avais aucun cours en commun avec Damien et les Jumelles. Aphrodite avait disparu de la circulation, ce qui ne m’inquiétait pas outre mesure : la connaissant, elle était encore en train de se prélasser avec Darius dans sa chambre.

Cette charmante image en tête, je m’assis à mon bureau pour mon premier cours : littérature. Quand Shekinah avait décidé de me permettre d’accéder au niveau supérieur en sociologie des vampires, elle avait omis de mentionner que je prendrais également du grade en espagnol et en littérature… Du coup, je craignais que le professeur Penthésilée, mieux connu sous le nom de prof P., nous assigne un ouvrage et un devoir cent fois trop difficiles pour moi.

Je n’aurais pas dû m’inquiéter. Prof P. était là, toujours aussi belle, dans le style bohème, mais son comportement avait changé du tout au tout. Elle commença par nous faire passer des exercices de grammaire. Sans blague. Elle remit à chacun une demi-douzaine de polycopiés recto verso, truffés de pièges allant de l’anacoluthe au diagramme de phrases complexes.

Pour certains ados – je dirais même pour la majorité des ados suivant un cursus public – ça n’aurait rien eu de choquant. Mais, là, il s’agissait de la Maison de la Nuit, ou de la Boîte de vampires, comme l’appelaient les humains. Ici, on ne s’ennuyait pas en classe, surtout pas avec cette prof ! Elle m’avait captivée dès ma première heure de son cours en annonçant que nous étudierions La nuit du « Titanic », de Walter Lord. Elle vivait à Chicago à l’époque du naufrage, et elle se souvenait de détails passionnants sur les rescapés et sur la vie au début du XXe siècle.

Aujourd’hui, assise à son bureau, complètement éteinte, elle fixait l’écran de son ordinateur. Sur l’échelle du charisme, elle n’avait rien à envier à Mme Fosster qui, dans mon ancien lycée, avait gagné le prix du Pire Professeur d’anglais et le surnom de Reine des polycops. Sans aucun conteste, Penthésilée jouait le jeu des envahisseurs.

Ensuite, j’avais espagnol. Non seulement le niveau était beaucoup trop élevé pour moi, mais Mme Garmy avait atteint, elle aussi, le degré zéro de l’enseignement.

Avant, elle faisait des cours super intéressants ; désormais, elle sautillait d’un élève à l’autre pour nous aider à rédiger la description de la photo projetée sur le tableau blanc interactif (une photo de chats, euh… de gatos, se prenant les pattes dans une ficelle, un hilo – enfin, vous voyez le topo). Avec ses tatouages en forme de plumes, on aurait dit un moineau neurasthénique.

Professeur vendu aux envahisseurs numéro deux.

J’aurais pourtant préféré passer la journée avec elle que me rendre au cours de sociologie avancée des vampires, assuré – vous l’aurez deviné – par Neferet.

Au début de mon séjour à la Maison de la Nuit, j’avais refusé qu’on me change de niveau en sociologie. Je ne voulais pas être stigmatisée comme l’élève de la première année bizarre qu’on avait mise en dernière année parce qu’elle était trop « spéciale ».

Cependant, j’avais vite compris que je ne pourrais pas passer incognito, et je m’étais résignée à accepter mes particularités, ainsi que les responsabilités (comprenez : les ennuis) qui allaient avec.

Ce soir, j’avais beau me répéter que c’était un cours comme les autres, j’étais incapable de me débarrasser de ma nervosité.

Je trouvai un bureau au fond de la salle et je m’affalai sur mon siège, décidé à me comporter comme ceux de mes camarades qui passent leur temps à somnoler en classe et ne se réveillent qu’au moment de changer de salle.

Ça aurait peut-être marché si Neferet avait été aussi apathique que ses collègues. Malheureusement, il n’en était rien. Elle rayonnait de puissance et de ce que les plus crédules devaient prendre pour du bonheur. En réalité, c’était la jubilation malveillante d’une sorcière se délectant à l’idée des carnages à venir.

A la place de l’insigne de Nyx – la déesse brodée en fils argentés, tenant dans ses mains levées un croissant de lune –, elle portait à présent une chaîne en or, au bout de laquelle pendaient deux ailes en pierre noire.

Pourquoi étais-je la seule à ne pas être dupe de son jeu et à sentir l’énergie maléfique qui émanait d’elle ?

— Aujourd’hui, nous allons étudier un aspect des capacités que seuls possèdent les vampires, ou les novices très avancés, annonça-t-elle. Ouvrez vos livres à la page 426, chapitre sur l’occultation.

Elle n’avait aucun mal à capter l’attention du petit groupe d’élèves. Elle faisait les cent pas à l’avant de la classe, royale dans sa robe longue noire, rehaussée de fil doré qui ressemblait à du métal liquide. Ses cheveux roux foncé étaient attachés en un chignon dont s’échappaient quelques mèches ondulées, encadrant son superbe visage. Elle s’exprimait d’une voix raffinée, agréable à l’oreille.

Elle me fichait une peur bleue.

— Je veux que vous lisiez ce chapitre en silence. Ces cinq prochains jours, vos devoirs consisteront à tenir le journal de vos rêves. Bien souvent, des désirs et des talents enfouis remontent à la surface quand nous dormons. Alors, avant de vous endormir, vous repenserez à cette lecture et à ce qu’elle signifie pour vous. Quels troubles secrets cachez-vous au monde ? Où iriez-vous si vous vouliez que l’on ne vous retrouve pas ? Que feriez-vous si personne ne pouvait vous voir ?

Elle regardait les élèves tour à tour. Certains lui souriaient avec timidité ; d’autres détournaient les yeux, d’un air coupable.

— Ma chère Brittney, veux-tu nous lire le passage sur la dissimulation, page 432 ?

Une petite brune hocha la tête, feuilleta son livre et commença.

— « La dissimulation

« La plupart des novices connaissent cette aptitude à masquer leur présence aux gens de l’extérieur. Ils l’utilisent traditionnellement quand ils s’échappent du campus afin de conduire des rituels au nez et à la barbe de la communauté humaine. Même dépourvus d’affinités, ils peuvent appeler la nuit et lui demander de tromper les sens imparfaits de l’humain moyen. Néanmoins, ce n’est qu’un aspect infime d’une capacité que seuls les vampires adultes peuvent maîtriser. »

Neferet l’interrompit.

— Vous apprendrez dans ce chapitre que n’importe quel vampire peut se déplacer inaperçu parmi les humains, déclara Neferet, ce qui peut se révéler très utile quand on connaît leur propension à porter des jugements catégoriques sur nos activités.

Je fixais le texte, les sourcils froncés, en me disant qu’il était impossible que personne ne remarque ses préjugés contre les humains, quand sa voix cinglante s’éleva juste à côté de moi.

— Zœy ! Comme c’est gentil de te joindre à ce cours, plus adapté à tes capacités.

— Je vous en prie, dis-je en croisant son regard glacial. J’ai toujours aimé la sociologie.

Son sourire me faisait penser à la créature terrifiante d’Alien, ce vieux film franchement flippant avec Sigourney Weaver.

— Formidable. Et si tu nous lisais le dernier paragraphe ?

Ravie d’avoir une excuse pour baisser la tête, je me lançai.

— « Les novices doivent savoir que la dissimulation est une pratique très éprouvante. Appeler la nuit et la retenir pendant une période prolongée nécessite un grand pouvoir de concentration. Il convient également de comprendre que cette expérience a des limites, et notamment :

« 1. Elle ne fonctionne qu’avec de la matière organique ; ainsi, il est beaucoup plus facile de rester caché en habit de nuit (nu).

« 2. Tenter de dissimuler des objets comme des voitures, des motos, ou même des vélos, est une entreprise vouée à l’échec.

« 3. Comme toutes nos aptitudes, celle-ci a un prix. Pour certains, ce ne sera qu’une légère fatigue et une migraine ; pour d’autres, elle aura des conséquences bien plus graves. »

— Ce sera tout, Zœy. Alors, qu’as-tu retenu ? Concrètement, je venais d’apprendre que mes amis et moi ne nous échapperions pas en Hummer, à moins d’obtenir une autorisation de quitter le campus.

— Les voitures et d’autres objets ne peuvent être dissimulés aux yeux des humains, répondis-je d’un air studieux.

— Ou des vampires, compléta-t-elle d’un ton ferme. N’oublie surtout pas que nous pouvons voir les corps non organiques.

— Je m’en souviendrai. Cette fois, je disais la vérité.

[La Maison de la Nuit 05] Traquée
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